keyboard_arrow_up
ligue nationale
de volley

Léa, gardienne du temple

le 08/12/2021
A 25 ans, la libéro de l’ASPTT Mulhouse, Léa Soldner, a entamé sa huitième saison en Alsace. Gardienne de la maison et du temple, elle est aussi le parfait symbole d’une équipe jeune et ambitieuse qui a repris les rênes de la LAF le week-end dernier et veut désormais exister aussi en Ligue des Champions.
lnv

Se faire «traiter» d’ancienne quand on a 25 ans et l’avenir droit devant, cela pourrait être un tantinet vexant, voire déplacé. Pourtant, Léa en sourit et en rajoute même, avec ce ton enjoué et ses mots au galop. La jeune postière, née dans les prés alentours, à Kingersheim, à 6 km de là, a lancé en octobre dernier sa huitième saison à l’ASPTT. Elle est marquée au fer et le blason du club alsacien est aujourd’hui comme une deuxième peau. Dans l’effectif, fortement renouvelé et rajeuni à l’intersaison, elle est un phare, une référence et l’incontestable gardienne du temple. Son poste de libéro en fait la sainte patronne de la défense mulhousienne, ses années au Palais, son palmarès, qui épouse à la couture près celui du club depuis son arrivée en 2014, lui font les traits sages de «l’ancienne» qui sait. «Je fais partie des meubles, c’est vrai», sourit-elle. «Je ne m’en rends pas compte. Au final, à chaque fois la saison est différente et mon rôle aujourd’hui dans l’équipe est différent. Quand je suis arrivée, j’étais un peu le bébé de l’équipe, c’était tout nouveau pour moi, je sortais de l’IFVB à Toulouse, je ne connaissais pas le niveau pro français. Maintenant, j’ai grandi, j’ai une place d’ancienne ici.»

Une place, mais aussi un rôle fondamental, qui l’anime tous les jours et qu’elle aime sans restriction. Libéro pourtant, ce n’est pas très aguichant. C’est tout là-bas, dans l’ombre, en bout de terrain, loin des projecteurs et des boules à facette. Sur son lopin de terre, Léa ne fait pas dans le clinquant, mais elle polit et rend les choses belles. Un ballon propre, une relance au cordeau et elle est la plus heureuse des jeunes femmes. «C’est toujours le même plaisir. Je sais que c’est un rôle de l’ombre, mais je comprends à quel point le libéro est important pour une équipe .Il y en a beaucoup sans doute qui seraient frustrés de faire ça, mais moi je ne ressens aucune frustration .Quand je défends un gros ballon et que le public se lève, c’est l’une des meilleures sensations que je puisse éprouver. Et faire mon petit taf derrière, discret, ça correspond bien à ma personnalité», relate Léa tout heureuse dans son monde.

D’autant qu’avec l’arrivée de François Salvagni à la tête technique de l’équipe il y a un peu plus de deux ans, Léa a ouvert un peu plus son horizon sur un poste qui recèle toujours des secrets. Elevée, propulsée, nourrie par les verbes et la vision technique impeccable de l’emblématique coach de l’ASPTT, Magali Magail, devenue manager général du club, Léa pioche aujourd’hui dans la culture italienne de François Salvagni d’autres fondements du libéro. «Si c’est à Magali que je dois ma place de libéro titulaire dans l’équipe, le fait que François soit arrivé avec une vision étrangère, nouvelle du poste, a été très bénéfique pour moi. François m’a beaucoup fait évoluer en défense. Il a fallu que je change ma gestuelle, avec une réception moins dans l’axe. Dans le volley français, on est beaucoup dans le déplacement dans l’axe, avec un plateau droit devant, tandis qu’en Italie, le plateau se déplace sur le côté, on est plus dans une réception latérale et ainsi, on peut couvrir plus de terrain. C’est un atout de plus pour moi», raconte la titulaire d’une Licence en Sciences de l’Education, qui soutiendra son mémoire l’année prochaine pour valider son Masters 2.

Léa continue donc de se régaler, d’autant que la bagarre en LAF avec Le Cannet, Cannes et Nantes est belle cette année. Champion de France au long cours en ayant allègrement dominé ses adversaires la saison passée, l’ASPTT vient tout juste de reprendre les commandes du championnat au Volero le week-end dernier ! Largement recomposé cet été, Mulhouse a eu besoin d’un peu plus de temps pour créer du lien et se mettre en place. «C’est une équipe très jeune, Léandra (Olinga) est notre capitaine et elle n’a que 23 ans, tout comme notre passeuse, Pia (Kästner), et  moi je fais partie des plus âgées ! C’est une équipe talentueuse qui est en en recherche d’expérience, alors que l’année dernière, à la fin de la saison, on était une équipe d’expérience et rodée. Mais je trouve que jusque-là, on s’en sort plutôt très bien», résume Léa.

De l’expérience, cette jeune ASPTT va en emmagasiner beaucoup en Ligue des Champions. La scène européenne est magique et c’est un tremplin sans égal. Mulhouse veut désormais y jouer un rôle aussi. En voyage à Monza aujourd’hui, les Alsaciennes savent que le défi est rude, mais ô combien formateur. «J’ai le sentiment que le club ne demande qu’à grandir, qu’à évoluer. Ce qui nous manque c’est de performer en Champions League. On est dans une grosse poule, mais c’est ce qu’on veut : se frotter à de grosses équipes, voir où on en est. Il faut y aller libérées, prendre du plaisir, s’éclater», avise Léa qui, avec tout ça, aura fait le tour sa saison, avant de réserver ses étés pour ses études et pour les siens. C’est ainsi depuis 2016 et la disparition de son papa. L’équipe de France n’a désormais, a priori, plus de place. «J’ai beaucoup parlé avec le sélectionneur, Emile Rousseaux. C’est un choix personnel de ne pas faire partie de l’équipe de France. J’ai besoin du temps l’été avec mes proches et pour travailler mes cours, me ressourcer. Sans cette coupure-là, je sais que je ne serais pas performante», estime Léa, gardienne d’un temple mulhousien avec lequel elle sait qu’elle a encore mille grandes choses à vivre.

lnv